Quartier Très-Cloitre
Dès le Moyen-âge un faubourg embryonnaire s’édifie, au-delà de la cathédrale Notre-Dame et de son cloître en dehors des enceintes romaines, avec pour nom originel « trans clostrum » ou « trans Claustra » Il se développe autour de la rue Très-cloître, avec de part et d’autre, des ruelles étroites et courbes dont les noms empruntent aux métiers pratiqués (rue des Beaux-Tailleurs, rue du Fer-à-Cheval, etc.) ou aux congrégations qui s’y établissent au fil des ans (rue du Vieux-Temple, rue des Minimes, rue Sainte-Ursule…). A la fin du XVIème siècle, le connétable de Lesdiguières pousse les murailles et une partie du quartier se retrouve à l’intérieur des remparts. La porte Très-Cloitre (construite en 1593 - détruite en 1834) marque le départ d’une des routes menant à Vizille.
Pendant très longtemps le quartier Très-Cloitre est resté le lieu de d’installation des primo-arrivants dans la ville, à l’intérieur des fortifications.. C’était un endroit de passage propice aux rencontres et opportunités pour une installation définitive dans le reste de la ville avant de se hisser dans la société grenobloise et de se rapprocher des beaux quartiers de la place St André et de la place Grenette. Cette fonction de filtre, Très-Cloîtres l’a conservée jusque dans les années 1980 date de la mise en oeuvre du programme de rénovation-restauration du quartier.
Il a vu se succéder toutes les vagues d’immigration. Deux l’ont particulièrement marqué au cours de la seconde partie du vingtième siècle : l’immigration italienne et l’immigration algérienne. L’immigration italienne s’est installée dans le quartier dans l’entre-deux guerres jusque dans les années cinquante avant d’essaimer vers le reste des quartiers anciens : place Notre Dame, rue Chenoise, rue Brocherie, puis Saint Laurent et enfin la banlieue. L’immigration algérienne arrivée plus tardivement dans le quartier (année soixante et soixante-dix) a été une immigration de travailleurs seuls. Elle s’installe dans les lieux laissés en déshérence puis dans des café-garnis – marchand de sommeil - qui fournit «l’accueil» aux primo-arrivants (un repas, un microcrédit, un lit en 3x8) et leur permet de se faire une place dans le quartier. Progressivement, ils prennent les places laissées vacantes par les immigrés italiens, eux-mêmes ayant effectué un retour au pays (environ 60 à 70%) ou ayant migré sous des cieux plus cléments après amélioration de leur niveau de vie (le niveau de vie français a été multiplié par 3 entre 1945 et 1975).
En 1970, A l’Ouest du quartier, les remparts ont été remplacés par de nouvelles murailles plus sociologiques : les Trois Tours, l'immeuble en de l'Ile Verte, le nouvel Hôtel de Police, la nouvelle Cité Administrative, le quartier rénové de la Mutualité, peuplés et lieux de travail des classes moyennes tertiarisées. Le quartier reste un quartier ouvrier et est composé majoritairement de logements insalubres et inconfortables, d’une qualité proche de favela brésilienne ou du ghetto nord-américain. Il est perçu comme la « médina » de Grenoble (25% d’algériens, 60% d’étrangers) et vu comme un lieu de relégation.
A cette époque et jusqu’au milieu des années 70 les quartiers anciens et leur patrimoine font l’objet du même rejet que les grands ensembles (Villeneuve, Mistral, Teisseire…) aujourd’hui. Certains (quartier de la Mutualité) ont été complètement éradiqués. Mais le vent tourne en 1975, grâce à une politique d’investissement public de la part de la municipalité Dubedout (rachat, démolition, curetage, réhabilitation, reconstruction d’immeubles) le quartier Très-Cloîtres connait une 1ère rénovation. L’objectif était de maintenir le parc social locatif public au sein des quartiers anciens du centre, ce qui n’était pas forcément au goût des bobos irrésistiblement attirées par les vieilles pierres et les vieilles poutres et d’arrêter le processus de «gentrification» résidentielle qui poussait vers la périphérie de la ville ceux qui n’avaient plus les moyens de rester dans le vieux centre.
Au milieu des années 80, une seconde rénovation, initié par la municipalité Carignon et à base d’investissements privés permet la revitalisation de ce qui était resté en état d’avant 1970. Aujourd’hui, c’est un petit quartier tranquille du centre-ville avec ses vieilles pierres et son mélange d’immigrés d’origine maghrébine et de bobos.
Années 1980 : après une première rénovation. Sur le 2ème cliché, on voit qu'il n'y a qu'un coté de renové
Le quartier en 2015 : quelques vues