Caserne de Bonne - entre rêve et écologie
Génèse
La caserne de Bonne a été construite au XIXe siècle dans la ville de Grenoble à l'emplacement de la place Victor HUGO avant d’être déménagée vers 1885 . Elle a servi successivement de caserne pour l’armée française, de prison pendant l’occupation allemande, puis de siège du Centre de défense nucléaire biologique et chimique dans les années 70. Au moment où l’armée se professionnalise et resserre ses effectifs, la Grande muette vend en 2004 pour 6,7 Millions d’Euros les bâtiments à la ville de Grenoble.
A l’origine, la reconversion de ce terrain militaire de 8,5 hectares ne prévoyait pas d’éco-quartier. La création d’un « quartier durable » fut l'occasion de montrer l’engagement de Grenoble en faveur de la mixité sociale et d’une bonne qualité environnementale et architecturale de l’urbanisme. La ZAC est créée en 2003, et l’éco-quartier, comportant 850 logements (dont 35% en locatif social), 15 000m2 de commerces et 5000m2 de bureaux est construit entre 2008 et 2014. En 2009 l’État lui décerne « le prix du meilleur éco-quartier », faisant ainsi du quartier un référentiel national qui n’existait pas encore.
Les désillusions
Dès les 1ère livraisons en 2008, la presse locale dénonce la création d’un « ghetto de riche » avec un prix au mètre carré flirtant avec les 4000 euros et un pourcentage de logements sociaux regroupant des tranches de revenus pouvant aller du simple au quadruple.Mais il reste en phase avec son environnement immédiat (Grands Boulevards, Aigle, Championnet) qui n'est pas non plus un ensemble de quartiers dit « populaires »
En 2011, les premiers bilans de l’éco-quartier de Bonne sont rendus publics. Le Monde et Libération soulignent alors le décalage entre les attentes et les résultats. Des constats et dysfonctionnements semblent en effet noircir le « meilleur éco-quartier » et parlent d’un « écologisme de façade ».
Le bilan énergétique met en avant des consommations nettement supérieures aux objectifs avec des surconsommations d’énergie pour le chauffage (de 5 % à 70 % supérieures à l'objectif assigné - 42,5 kWh/m2/an) et pour l’eau chaude. Possible qu' un manque de sensibilisation des habitants impliquent des comportements en décalage avec les normes écologiques prévues . Ou que la qualité de l'habitat n'atteignent pas lesz objectifs de sobriété fixés.
La vie socio-économique du quartier reste peu attractive par manque de commerces de proximité malgré une galerie marchande assez fournie en enseignes. Ce projet devait être une extension de la zone de chalandise du centre-ville. Aujourd’hui, il n’en est rien.
Les vieilles pierres de l’ancienne caserne militaire construite vers 1880 ont été conservées et réhabilitées mais l’architecture cubique des bâtiments modernes reste standard et fadasse. Elle se retrouve dans toutes les métropoles françaises : Paris, Marseille, Lyon, etc.... À Grenoble, tous les quartiers modernes possèdent ce style : Vigny-Musset, ZAC Lustucru, Bouchayer-Viallet, Projet ARaymond...
La touche « nature » avec un beau petit parc s’étendant royalement sur 1,5 Ha (pour 2000 habitants environ) reste modeste. Quant à la boiserie style chalet de montagne entourant la galerie commerciale, il faudra voir dans quelques années son état sur le versant orienté plein Sud si aucun entretien n’est effectué.
Urbi et Orbi
Entre la théorie, ce qui a été vendu au public et la pratique, les failles sont rapidement apparues. Cet éco-quartier est pourtant considéré comme une réussite en termes de mixité sociale et de performance environnementale. Il est effectivement loin d’être déclassé comme le sont certains quartiers Sud construits entre les années 60 et 2000.
La création de ce quartier est aussi symptomatique de l’évolution de la France des métropoles, entre les 35% de logements sociaux annoncés et le ghetto de riche, entre les très aidés et les très aisés. Pour les classes moyennes et populaires en dehors des métiers nécessaire au fonctionnement de la métropole ce sera ailleurs pour se loger.
Aujourd’hui le quartier de Bonne de Grenoble continue de vivre avec son premier prix et s’efface progressivement des radars médiatiques par la diffusion et la banalisation du label éco-quartier à travers le monde